| | Merci! | |
| | Auteur | Message |
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gbi.bytos
Nombre de messages : 2 Date d'inscription : 07/10/2006
| Sujet: Merci! Sam 7 Oct - 22:45 | |
| ... aide inespérée il est vrai, tant le programme est effectivement complexe, avec pas moins de quelques monuments de littérature mondiale... Rabelais, Cervantès... Et notre poète, digne héritier mallarméen... Merci encore à M. Céry pour avoir mis en place une telle machine d'émulation et d'entraide... Du reste, merci pour le code! | |
| | | Sjperse Admin
Nombre de messages : 323 Localisation : Paris Date d'inscription : 12/08/2006
| Sujet: Re: Merci! Sam 7 Oct - 22:47 | |
| Je vous en prie...
Mais dites-moi, à propos de votre expression "digne héritier mallarméen" : que voulez-vous dire par là ? Rien n'est plus éloigné de Perse que Mallarmé, je vous assure...
L'influence de Mallarmé existe chez le jeune poète, celui des "Images à Crusoé", mais par la suite, le fossé est infranchissable. C'est même une éthique de la poésie qui les oppose : d'un côté l'art pour l'art, pour aller vite, et de l'autre un appel constant à une présence charnelle au monde, qui doit prendre le pas sur la parole poétique. Et il en va de même pour la forme poétique : ne pas croire que Perse relève d'une obscurité syntaxique quelconque, bien au contraire. Et pour ce qui est du lexique, à propos duquel je me suis beaucoup exprimé sur le forum, il s'agit de bien autre chose : en somme, d'un souci d'exactitude devant le réel et sa complexité. On peut dire aussi que Perse a au fond réalisé avec sa Pléiade le "Livre" total dont rêvait Mallarmé, mais là encore, l'image ne serait qu'un gadget... Non, il faut surtout s'imprégner je crois des différences irréconciliables je le répète qui opposent les deux dans l'attitude même devant la littérature et le monde. | |
| | | Fata Morgana
Nombre de messages : 14 Date d'inscription : 15/08/2006
| Sujet: Re: Merci! Dim 8 Oct - 14:00 | |
| à ce propos: je me demandais s'il y avait une forme d'ironie dans l'emploi de termes rares et techniques. SJP exhorte en effet à se détacher des livres poussiéreux du savoir sclérosant de l'Ancien Temps, du Vieux Monde : cela implique de se tourner vers le réel, le monde, les sensations, etc. Mais il emploie lui-même les vocables qu'il dénonce... peut-on y voir alors du second degré? un sourire mystificateur? j'ai parfois l'impression d'une certaine malice de la part de notre poète, qui d'ailleurs condamne la pose poétique de quelques uns de ses confrères, me semble-t-il... confrères qui se prennent parfois trop au sérieux au point de tomber dans l'hermétisme, et ce au nom d'une certaine conception élitiste de la poésie... évidemment, je dois nuancer mon propos: je ne dis pas que si ironie il y a elle explique exclusivement le lexique persien. Vous dites qu'il s'agit de dire le monde dans son exactitude; je suppose qu'il y ainsi en filigrane les théories de la profération : dire le monde tel qu'il est revient à le récréer, à l'incarner; sans doute y-a-t-il aussi le plaisir de proférer le terme rare, etc. Mais cette idée de second degré me taraude un peu... | |
| | | Sjperse Admin
Nombre de messages : 323 Localisation : Paris Date d'inscription : 12/08/2006
| Sujet: Re: Merci! Dim 8 Oct - 18:27 | |
| Bonjour à vous. Non, je ne crois pas du tout qu'il faille percevoir un second degré ou de l'ironie dans l'emploi des termes rares ou du lexique spécialisé chez Perse. Du reste, le rejet du savoir sclérosé ne concerne aucunement le langage, qui est un instrument au contraire respecté. Et il faut prendre ce prédicat très au sérieux, je vous assure - d'autant que dans les oeuvres qui ont été désignées à votre concours, tout un trajet si j'ose dire, permet de prendre en compte les enjeux de cette importance du langage, de Vents avec sa refondation de la parole, à Sécheresse, avec une sorte d'insurrection des mots eux-mêmes.
Il faut faire attention selon moi à ne pas mélanger les termes du rejet du savoir sclérosé : il concerne en fait la connaissance du monde qui provient d'une conception fixiste. Le langage en cela, doit être revivifié - et c'est le sens même de cette métaphore du langage par l'arbre qui apparaît au début de Vents. Et ce qui peut paraître comme archaïsme dans l'usage de l'étymologie par exemple, ou d'acceptions vieillies des vocables, relève en fin de compte de ce souci d'exactitude que j'ai dit, qu'il faut entendre comme une obsession de précision dans la nomination du monde. En remontant vers l'origine des termes (démarche étymologique) ou en faisant apparaître leur polysémie, on opère une sorte de procession vers la source originelle du langage et vers son lien fondateur avec le monde. Mais comme il est dit dans Amers, ce souci est indépendant d'un véritable délice : le "délice du mieux dire" dont il précise qu'il est susceptible d'engendrer "la grâce du sourire". Depuis Eloges, la parole poétique est conçue comme indissociable de ce plaisir de nommer : "Appelant toute chose, je récitais qu'elle était grande, appelant toute bête, qu'elle était belle et bonne". D'où la découverte du pouvoir démiurgique de la nomination du monde, dès les prémisses de l'oeuvre ; un pouvoir qui est parfois "inquiété" comme c'est le cas dans Exil par exemple, ou dans Vents pour ce qui touche à la transcription de l'acuité de l'expérience ontologique : "A moins qu'il ne se hâte, en perdra trace mon poème". Mais toujours, le langage est central, il s'agit du pivot d'une problématique de l'expression humaine, où se mêlent pouvoir de présence et délice d'être.
C'est pourquoi vous avez eu raison de souligner cette notion de plaisir. Mais je crois qu'elle est incompatible, en tout cas chez Perse, avec une ironie envers le langage. Il faut bien percevoir tout l'enjeu qui se joue entre l'immanence de la présence au monde, et la transcription par le langage. Il s'agit pour lui de rechercher l'angle juste. Et tout le travail minutieux de la langue, tout cet artisanat du mot que ne cessent de parcourir ses poèmes attestent bien de cette recherche ; et il s'agit pour lui de pourchasser l'hermétisme. Question délicate, car il existe chez lui un goût de l'équivoque des mots, mais qui relève de bien d'autres enjeux que l'hermétisme. J'avais eu l'occasion de me prononcer à ce propos d'ailleurs : il ne faut surtout pas croire en un élitisme par le langage chez Perse : il invite tout un chacun à pénétrer dans l'infinie subtilité de cette nomination du monde et du monde lui-même, mais en aucun cas cet appel ne se ferme à un quelconque élitisme, je le répète.
Donc, pas d'ironie ni de contradiction de la part de Perse dans l'emploi du vocable rare ou technique : il s'agit bien au contraire de rechercher cette symbiose du mot et de la chose, que d'aucuns qualifient de cratylisme. Et cette mission a pour objet non pas de nuancer le rejet du savoir établi, mais de transcrire au mieux la présence au monde dans le poème. Et c'est une aventure essentielle qui se joue là, de recueils en recueils. L'ironie existe chez Perse, mais je ne crois pas qu'il faille la rechercher là où elle n'est pas : on risque ce faisant de fâcheux contresens. Bien à vous, Loïc Céry | |
| | | Fata Morgana
Nombre de messages : 14 Date d'inscription : 15/08/2006
| Sujet: Re: Merci! Dim 8 Oct - 19:27 | |
| merci infiniment pour votre réponse détaillée et rapide! - Citation :
- il ne faut surtout pas croire en un élitisme par le langage chez Perse :
oui, c'est ce que j'avais compris en suivant vos discussions avec mes compagnons de galère agrégative et c'était précisément cela qui me posait problème par rapport à cette idée de second degré ou d'emploi ludique, qui est en outre fréquent dans la littérature du XXe siècle: critique de la poésie élitiste et hermétique et en même temps lexique complexe. Mais mon erreur venait du fait que j'avais amalgamé critique du savoir et critique du langage... hum... enfin je m'exprime mal, puisque en redonnant sa force de profération au langage, le poète renouvelle justement la connaissance du monde... langage et savoir sont toujours liés bien sûr... enfin l'important est votre réponse: - Citation :
- "Il faut faire attention selon moi à ne pas mélanger les termes du rejet du savoir sclérosé : il concerne en fait la connaissance du monde qui provient d'une conception fixiste."
très claire, elle... (mettons cela sur le compte de cette journée dominicale: mes neurones se reposent )! merci beaucoup! belle semaine à tous! | |
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