Tout d'abord, mille excuses pour le retard de ma réponse.
Le lien que vous faites entre cette mention et la Divine Comédie qui est, comme vous le savez, l'une des sources référentielles de Vents, est tout à fait bien sentie.
Un complément à votre intuition, dont on trouve trace dans Saint-John Perse sans masque, mais dont je vous indique ici la source, la référence précisément : pour le N° 6 des Cahiers Saint-John Perse (Gallimard, 1983), ont été publiées les notes que Saint-John Perse a transmises à son traducteur allemand, Friedhelm Kemp, en réponse aux demandes d'éclaircissements que celui-ci lui avait soumises. A propos de Lia, voici la question du traducteur et la réponse de Perse (je tiens à vous indiquer l'ensemble du dialogue, plus précisément que l'extrait qui est mentionné dans Saint-John Perse sans masque ; vous trouverez ceci à la p. 67 de ce N° 6 des Cahiers Saint-John Perse) :
F. Kemp : "Lia : la soeur de Rachel ? Pourquoi est-elle nommée ici ?"
Saint-John Perse : "Vocable, plus que nom historique ou trop allusif, utilisé ici pour évoquer le rôle éternel de liaison et d'entremise de la femme dans l'évolution sociale des vieilles civilisations déclinantes".
Alors je crois que l'intertexte que vous désignez là est tout à fait compatible et même assez complémentaire de cette explication livrée par le poète à son traducteur : l'action représentée par Lia chez Dante est tout à fait conciliable avec cette notion de "liaison et d'entremise" - d'autant plus, je le souligne, que si l'intertexte avait été directement évoqué par le traducteur, Perse l'aurait certainement nié, conformément à ses habitudes. Donc, encore une fois, je vous félicite pour l'acuité de votre lecture.
Bien à vous, Loïc Céry